La perte du nantissement invoquée par la caution dans la cession soumise à l’article L642-12 du Code de Commerce

COUR D’APPEL
DE RIOM du 8 février 2017

L’article 2314 du code civil prévoit que la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s’opérer en faveur de la caution. Par ailleurs, l’article L. 642-12 du code de
commerce, dans sa rédaction applicable au plan de cession litigieux, dispose que lorsque la cession porte sur des biens grevés d’un privilège spécial, d’un gage, d’un nantissement ou d’une hypothèque, une quote-part du prix est affectée par le tribunal à chacun de ces biens pour la répartition du prix et l’exercice du droit de préférence et que le paiement du prix de cession fait obstacle à l’exercice à l’encontre du cessionnaire des droits des créanciers inscrits sur ces biens. Ce texte ajoute que la charge des sûretés immobilières et mobilières spéciales garantissant le remboursement d’un crédit consenti à l’entreprise pour lui permettre le financement d’un bien sur lequel portent ces sûretés est transmise au cessionnaire et que celui-ci est alors tenu d’acquitter entre les mains du créancier les échéances convenues avec lui et qui restent dues à compter du transfert de la propriété ou, en cas de location-gérance, de la jouissance du bien sur lequel porte la garantie ; ce texte ouvrant une faculté de dérogation par accord entre le cessionnaire et les créanciers titulaires des sûretés.
Il importe, en conséquence, de déterminer si, en fonction de ces dispositions légales la caution s’est trouvée déchargée par le fait du créancier, l’application des dispositions de l’article 2314 sus-visé requérant la réunion de conditions cumulatives : la perte d’un droit du créancier, par le fait fautif et exclusif de celui-ci, sans lequel la caution aurait pu être utilement subrogée (en ce sens Cass. com. – 19 novembre 2013 – pourvoi n° 12-26.539).
En l’espèce, il ressort clairement tant des motifs que du dispositif du jugement de cession rendu par le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand le 20 décembre 2013, que les deux offres examinées par cette juridiction énonçaient l’accord des deux établissements bancaires concernés , pour limiter, pour chacun d’eux à la somme de 45 000 euros,la charge du transfert des sûretés résultant des dispositions de l’article L. 642-12 sus-visé.Les deux banques concernées avaient préalablement fait part de leur avis au tribunal par courrier et il y a donc lieu de retenir qu’il existait un accord express de leur part se traduisant, moyennant une contrepartie, par une limitation et non par la disparition de la charge du transfert des sûretés sur le cessionnaire dont il convient de déterminer les effets sur l’action engagée par la caution.
Toutefois, par une lettre du 19 novembre 2013, l’administrateur judiciaire avait fait connaître aux établissements bancaires qu’il était saisi de quatre offres et qu’un accord devait intervenir entre les candidats à la reprise et les banques titulaires d’un nantissement sur le fonds de commerce au titre des dispositions de l’article L. 642-12 du code de commerce afin que la cession projetée puisse aboutir.

Dans ces conditions, il ne peut être considéré que la limitation des effets du nantissement au prix de cession, résultant des impératifs de bonne fin de la procédure collective se traduisant par le maintien de l’activité, la reprise de 14 salariés et l’engagement d’investir 400 000 euros pour le renouvellement du parc des véhicules affectés à l’exploitation, consenti par la Banque, aurait présenté un caractère fautif.Par ailleurs, le jugement de cession ayant affecté la somme de 75 000 euros aux éléments corporels sur un prix de cession de 90 000 euros, pourtant déterminé dans le cadre d’une poursuite de l’activité, il n’est aucunement démontré qu’au cas de liquidation judiciaire la cession des actifs de l’entreprise, dans un cadre qui se traduit nécessairement par la dépréciation des actifs et, partant, de la valeur du fonds de commerce, aurait, en présence
de 22 salariés dans l’entreprise, permis de désintéresser les créanciers nantis dans des conditions préférables pour la caution. Ainsi, à supposer fautive la limitation des sûretés, M. B ne démontre pas, en tout état de cause, l’existence de son préjudice.

Publié le 1 mars 2017

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